Méditation marchée

Plongée dans un bain d’espérance. Du vert au-dessus, en-dessous, du vert de toutes les couleurs, à l’endroit, à l’envers, lumineux dans un sens, sombre de l’autre.
L’arbre craque, il geint, il meurt doucement et verse une larme, encore un soupir. Il n’en finit plus de souffrir, il n’en finit plus de mourir. A ses pieds un rejet, la relève. Forêt éternelle. A ses côtés, celui qui n’a jamais pu pousser droit, un grand coude à sa base. Malformation. C’est aujourd’hui le plus haut. Devant lui des triplés, 3 troncs en compétition. A qui sera le plus costaud, celui du milieu, celui de droite, celui de gauche. Toujours à l’unisson pour se chamailler, personne n’a jamais gagné. Eternellement à égalité.
Le rocher paresse, indolent, sous le massage délicat de la mousse. Pas de rébellion possible, autant en profiter. Elle l’aime, le chérit, il se laisse dorloter, caresser. Elle prend soin, elle rafraichit, la mousse. Un peu collante, certes, mais pas trop bavarde non plus. Une cohabitation paisible, à peine troublée par quelques intrus à 2, 4 ou 6 pattes. Ou mille. Et parfois 2 pattes sur 2 roues. Ce sont les pires, ils grondent et empestent, arrachent et piétinent.
Chemin qui craque, feuilles sèches, tapis de mousse, je m’enfonce. Sable, je coule, mes chaussures se remplissent. Pavés scellés, les romains sont passés par là, pierres plates, et si c’était les gaulois ?
Une armée de moucheron lutte, impuissante à freiner mon avancée. Un ballet incessant à quelques centimètres de mes yeux. Halte là, ne va pas plus loin, tu es ici chez nous.
Brise sucrée, sève de printemps, ni moisissure, ni champignon. C’est le temps de l’enfance et des goûters, de la naissance, de l’insouciance, de l’insolence. Le temps où l’on pense que rien n’a d’importance, que tout glisse et s’efface sans laisser la moindre trace. Rien ne se perd, tout se transforme disait la vieille prof de sciences naturelles au collège des bonnes sœurs. Les feuilles pourrissent et deviennent engrais. Les châtaignes oubliées germent pour faire les grands châtaigniers. Les paroles maudites, les actes mauvais, les gestes d’amour, les caresses interdites, les sourires de bonheur comme les feuilles des arbres de la forêt s’empilent au cœur pour renaître demain. Renaitre autres. Orties blessantes, fougères envahissantes, mousses protectrices, fleurs nourricières, carnassières ou meurtrières. Le temps de l’insouciance n’a qu’un temps, le hasard du berceau qui t’accueille, du sol qui soutient tes premiers pas, des projets que concrétisent tes premiers choix te feront pousser belle ou cassée, puissante ou défaillante, solaire ou de fer.
Une promenade en forêt et me voilà face à la vie. A nos multiples vies, les miennes, les vôtres. Celles qui se mêlent, s’emmêlent, se démêlent et aussi se détruisent. Celles qui s’observent, incapables de se rejoindre sauf quand il sera trop tard comme deux arbres arrachés dans la tempête se tombent dans les bras.
Des vies qui grâce au chant des oiseaux, au butinage des abeilles, au labourage des vers de terre, au ruissellement de la pluie, parfois par hasard parfois par désir, uniront pour un court instant ou toute une vie leur élan vers le ciel.
Il est bleu ce ciel, bleu puissant, bleu tout puissant. Bleu royal mais pas bleu roi. Dominant, pas menaçant. Sans un nuage. Bleu azur. Bleu infini. Un toit accueillant, un toit victorieux. Comme une équipe de France au sortir d’un grand chelem. Un toit qui descend jusqu’à la ligne d’horizon. Magie qui nous ramène à la terre d’où jaillit la couleur. Jaune, rose, bleu, encore vert, quelques traces de marron. Commencement et finitude réunis. Eternel recommencement.
Une forêt, des plantes, des rochers. Qui vient de qui. Qui est là, pourquoi. Qui l’a permis. Qui n’a jamais grandi ? Qui est parti trop tôt ? qui partira bien trop tard ? Qui a détruit l’autre ? Qui imite l’autre et lui en veut ? Psychodrame familial. Il est temps que vienne le grand nettoyage.

Point de départ :
Méditation marchée. Caler sa respiration sur ses pas, dans la conscience du déploiement du pied, visualiser l’empreinte laissée dans le sol. Se masser les oreilles pour écouter, toucher, sentir. Puis raconter la conversation ou la chose singulière que vous aurez rencontrée
« Chercher du noir partout c’est être sûr de ne jamais échouer »
« Chercher les petites merveilles de la vie comme un point d’eau dans le désert. »

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